Marcel Cachin
Prolétaire, adhère au Parti Communiste !
Camarades,
Nous vous avons réunis pour vous demander votre adhésion au Parti Communiste.
Et nous voulons vous dire pourquoi il faut donner désormais à ce Parti votre concours et votre dévouement. Un grand nombre d’entre vous ont déjà milité dans des organisations de la classe ouvrière. Mais ils ne sont pas encore décidés à rentrer dans le Parti communiste. Le moment est venu pour tous les militants dignes de ce nom, de franchir ce pas nécessaire.
Crise, misère, fascisme et guerre
En effet, la situation des ouvriers et des travailleurs salariés est devenue partout de plus en plus intolérable. Nul ne nie plus que nous soyons parvenus à l’époque où le capitalisme décline. Arrivé à sa fin, il se retourne vers la classe sur laquelle il vit, depuis des siècles, en parasite, et il entend l’exploiter plus durement encore. La crise a aggravé partout à l’extrême les conflits de classe. Économiquement, elle engendre le chômage et la misère, avilit les salaires, réduit les conditions de vie de la classe ouvrière et paysanne et celles de la petite bourgeoisie. Politiquement, elle tendra de plus en plus vers les pleins pouvoirs, vers le fascisme, vers un alourdissement de plus en plus insupportable de la dictature bourgeoise. Et pour conclure, la crise hâte l’heure d’une nouvelle guerre mondiale.
Chaque jour, la preuve vous est donnée que le monde capitaliste se montre incapable d’arrêter la marche de ce fléau. Au contraire, les choses vont de pire en pire. C’est vrai pour tous les pays où domine le régime capitaliste. En France, vous assistez comme ailleurs, à une offensive de grand style des défenseurs du régime pour aggraver le sort matériel des salariés et des paysans et pour préparer la guerre.
On prétend, il est vrai, dans certains milieux (qui ne sont pas seulement des milieux bourgeois) que la crise pourrait bien s’atténuer jusqu’à disparaître et laisser place de nouveau à la prospérité du régime capitaliste redevenu normal. Tous les faits protestent contre cette hypothèse gratuite. Les rivalités s’aiguisent entre les impérialismes nationaux. Les contradictions d’intérêts s’approfondissent. Depuis quatre ans la crise a sévi presque sans éclaircies et le chaos économique a envahi les pays qui semblaient les mieux armés pour le combattre, comme les États-Unis et l’Allemagne. Nous constatons partout un plus grand esclavage de la classe ouvrière, une dépossession rapide des classes moyennes. Et la catastrophe de la guerre apparaît de plus en plus prochaine.
« Le capitalisme ne peut se relever »
Parallèlement l’on constate aussi une combativité accrue dans les rangs des salariés. C’est un phénomène naturel et heureux, car il ne faudrait pas croire que la chute du capitalisme se produira mécaniquement demain et qu’il n’a plus désormais aucune possibilité de prolonger artificiellement son existence. Il sait bien user pour cela de la violence comme de la corruption, de la ruse. Il a une longue expérience de l’exploitation et de domination sur la classe ouvrière et paysanne. Mais ce qui est sûr c’est que ses positions sont minées et qu’il offre à l’action de classe des ouvriers et de toutes ses victimes une résistance beaucoup moins assurée que dans le temps de sa prospérité. Il faut ajouter que l’existence de puissante républiques socialistes soviétiques et la construction victorieuse du socialisme (de l’aveu de tous les gens de bonne foi) contribuent à ébranler encore le capitalisme à son déclin.
Si cette analyse est juste, et tous les faits la confirment, il en faut tirer les conclusions pratiques et pour notre entretien de ce soir, elles sont de portée décisive.
Le capitalisme ne peut se relever, il ne saurait plus retrouver sa vie normale pendant laquelle il s’assurait sont profit, un minimum de vie à ses ouvriers et un ordre relatif traversé de grèves et de luttes. Alors que faire ?
La social-démocratie fait le lit du fascisme
Les réformistes s’efforcent d’aider le régime capitaliste à opérer un redressement impossible : ils entraînent les ouvriers à sa défense en leur faisant espérer qu’il peut encore leur assurer une vie suffisante et même les garantir contre la guerre. Il n’y a, disent-ils, qu’à suivre le fil de la démocratie bourgeoise.
La social-démocratie s’est développée pendant près d’un demi-siècle avant la guerre de 1914, au temps du grand essor de la bourgeoisie. Durant ce temps, elle a pu se développer elle-même à l’abri de quelques lois démocratiques, arrachées par de pénibles et sanglantes luttes ouvrières. Le prolétariat avait pu conquérir au cours de ces luttes, quelques libertés syndicales et politiques, des réductions de la journée de travail, des augmentations de salaires, des assurances sociales.
Mais après la guerre impérialiste le capitalisme s’est retourné vers la classe ouvrière pour lui enlever par la violence les quelques avantages concédés et lui faire payer, à elle seule, les frais de sa crise. Il a eu recours au fascisme qui est sa création, son œuvre, son instrument adapté aux formes présentes de la lutte des classes exaspérée.
La social-démocratie trompait les ouvriers en leur disant qu’un événement pareil n’était pas possible. La veille encore du 5 mars 1933, du succès électoral de Hitler, le parti socialiste allemand déclarait que le fascisme était un produit italien ou balkanique qui n’était pas fait pour le Reich.
En quelques jours cependant, tout l’appareil démocratique : le parlement, les syndicats, les maisons du peuple, les coopératives, les assurances sociales, les salaires élevés, tout a été emporté par la violence du capitalisme.
Malgré cela , les chefs socialistes continuent leur politique de trahison. Les événements de l’Allemagne hitlérienne ont cependant porté le dernier coup à leur politique du « moindre mal ». Cette politique a accumulé les déceptions et créé la division dans la classe ouvrière et a fait ainsi le lit du fascisme.
Elle correspondait à la constitution d’un parti essentiellement électoral, avec une discipline très lâche, où élu parlementaire et municipal jouait le rôle déterminant. Voyez en France ce que devient aujourd’hui le parti S. F. I. O., les outrages vulgaires et sordides qu’ils échangent entre eux, alors qu’ils professent une théorie de défense du régime capitaliste. Le parti S.F.I.O. se décompose de l’intérieur sous l’effet même de la crise générale et de la colère de sa base ouvrière. Quant aux chefs des autres partis socialistes, un peu partout, au Japon, en Pologne, en Roumanie, en Bulgarie, en Tchécoslovaquie, ils ont offert et continuent d’offrir leurs services à leurs bourgeoisies nationales, même lorsque ces bourgeoisies glissent au fascisme le plus caractérisé.
La constitution du Parti communiste : les 21 conditions
Camarades, à notre analyse révolutionnaire de la société capitaliste correspond une conception tout autre d’un parti de la classe ouvrière.
Notre Parti communiste s’est constitué à Tours, à la fin de 1920, sous l’influence de la crise générale provoquée par la guerre et de la Révolution soviétique d’Octobre qui eut une si profonde répercussion dans la classe ouvrière du monde entier. Une grande majorité du prolétariat socialiste français d’alors réclama son adhésion à l’Internationale communiste et accepta les fameuses 21 conditions qui ont été l’objet, alors et depuis, de si éclatantes controverses. Ces controverses ne sont pas éteintes.
Quelles étaient donc ces 21 conditions ? Lorsqu’on les reprend aujourd’hui, à la lumière des événements, elles apparaissent toujours à chacun de nous comme indispensables à la constitution d’un grand parti qui a la prétention de mener le prolétariat à la conquête du pouvoir. Elles se justifient à cette heure comme par le passé. Elles sont le fruit de l’expérience prolongée de militants qui ont su, en les appliquant, réaliser une révolution victorieuse.
Que trouve-t-on dans les 21 conditions ?
Résumons-les pour vous permettre de les juger :
Elles proclament la nécessité primordiale de constituer un parti d’opposition irréductible à la bourgeoisie, absolument indépendant de toute autre formation politique, dont le premier devoir est de combattre quotidiennement et sans merci le capitalisme et son gouvernement quel qu’il soit.
Elles exigent aussi que l’on démasque les chefs réformistes syndicaux et politiques, qui par leur collaboration avec la bourgeoisie et le soutien qu’ils lui apportent, prolongent l’existence du régime capitaliste.
Le Parti doit afficher hautement que son but est l’établissement de la dictature du prolétariat.
En ce temps où la lutte de classe entre dans la période de la guerre civile, il serait insensé de se fier à la prolongation de la légalité bourgeoise. Dans les pays, où provisoirement se maintient une légalité relative, il importe donc de créer un organisme clandestin parallèle au Parti, capable, le moment venu, d’aider le Parti dans sa lutte. La concomitance de l’action légale et illégale est tout à fait indispensable.
Le Parti doit mettre à sa tête un Comité central : dans cet organisme il placera les militants éprouvés et sûrs qui désigneront pour rédiger sa presse, pour diriger ses éditions, pour le représenter dans les assemblées parlementaires et municipales, des hommes qui lui devront des comptes et qui lui seront subordonnés.
Le Parti devra mener contre la guerre, contre le pacifisme bourgeois vulgaire, contre l’hypocrisie de Genève, contre toutes les illusions démocratiques, une lutte incessante. Il doit poursuivre une propagande systématique et persévérante parmi les troupes.
Les partis communistes doivent avoir une ligne claire et nette sur la question des colonies et des nationalités opprimées. Ils doivent dévoiler sans arrêt les menées de leurs impérialistes, soutenir effectivement les mouvements d’émancipation des peuples colonisés.
Ils doivent apporter leur soutien indéfectible à toutes les Républiques soviétiques dans leur défense contre les forces contre-révolutionnaires.
Ils doivent mener une action régulière et constante parmi les paysans pauvres.
Le principe de la centralisation démocratique est à la base de tous les partis communistes. A l’époque actuelle de la guerre civile, le Parti communiste ne pourra remplir son rôle que s’il est fortement centralisé, s’il y règne une discipline militaire, si son organisme central jouit près des membres du Parti d’une autorité et d’une confiance absolues. Naturellement, les décisions des congrès de l’Internationale communiste et celles de son comité exécutif sont obligatoires pour tous les pays affiliés.
Dans la 9e condition, l’Internationale communiste faisait obligation à tous les membres du Parti de porter leur action dans les syndicats, dans le travail à l’usine. Par la suite, à mesure que se déroulaient les événements, l’Internationale a insisté sur la nécessité primordiale de fonder le Parti sur l’usine, sur l’entreprise elle-même, de remplacer les anciennes sections de structure socialiste par la cellule d’usine plantée au cœur même de la production capitaliste.
Telles sont, dans leur essence, les 21 conditions. Nous le demandons à tous : l’expérience de ces dernières années n’a-t-elle pas prouvé qu’elles étaient toutes sérieuses et nécessaires ?
Si aujourd’hui le Parti communiste allemand peut continuer sa lutte héroïque contre l’hitlérisme, c’est qu’il les a appliquées depuis treize ans.
Mettre en accord ses paroles et ses actes
Notre Parti communiste s’est efforcé, depuis Tours, sans y parvenir pleinement toujours, de remplir les conditions fixées par l’Internationale, notre instance suprême à tous.
Il est devenu un parti prolétarien. Il est devenu un parti international.
Il a réalisé les plus grands efforts pour lutter contre la guerre : sans répit il a été sur la brèche pour en signaler les dangers.
Il a rendu populaires les mots d’ordre de lutte contre l’impérialisme : transformation de la guerre impérialiste en guerre civile.
Il a combattu contre le Traité de Versailles, source inépuisable de troubles européens, qui a abouti à Hitler et qui déchaînera demain le conflit.
Il a été poursuivi pour avoir protesté et agi, seul en France, contre l’occupation criminelle de la Ruhr par Poincaré.
Il a été poursuivi pour avoir réclamé la fraternisation en pleine guerre marocaine avec les Arabes révoltés qui se défendaient les armes à la main.
Ses militants ont été et sont encore l’objet de poursuites par centaines pour menées antimilitaristes, propagande dans l’armée, appel des soldats à la désobéissance à la bourgeoisie.
Il a considéré comme son devoir suprême de défendre l’Union Soviétique contre les préparatifs d’agression qui ne se sont pas arrêtés depuis octobre 1917.
Il ne s’est pas passé de jour sans qu’il riposte aux innombrable attaques dont sont encore l’objet les constructeurs du socialisme.
Le Parti a pris la tête des luttes ouvrières et il a mis son organisation, son journal, son appareil entier à la disposition exclusive de ces luttes quotidiennes à l’usine, aux champs et à la caserne.
Il s’est efforcé de remédier à l’absence presque complète d’études théoriques dans le prolétariat français.
Il a développé un grand travail d’éducation des ouvriers ; il a édité d’innombrables brochures de vulgarisation des œuvres de Marx et de ses successeurs Lénine et Staline.
Il a fait une propagande sans arrêt pour créer des cellules dans l’usine même et sur le lieu de travail. Il doit persévérer dans cette tâche qu’il considère comme centrale.
Il veut obéir au mot d’ordre de Lénine :
« Il faut que chaque entreprise soit notre forteresse ». Le Parti communiste veut être tout autre chose qu’un club de discussion, qu’une organisation d’agitation par meetings. Il doit être, par dessus tout, un organe réaliste, de préparation patiente et obstinée de combattants révolutionnaires.
Son programme est celui de la transformation de la société capitaliste en une république soviétique universelle de travailleurs. Et chaque communiste doit se donner pour règle de mettre en accord ses paroles et ses actes.
Notre Parti communiste bataille depuis sa constitution sur cette ligne générale. Au cours de son histoire, il fut victime de répressions brutales, de trahisons répétées. Les deux plus répugnantes furent celles de deux anciens secrétaires du Parti qui se firent payer cher par la bourgeoisie leur lâche trahison. Frossard l’a quitté au moment de la Ruhr ; Sellier est parti lorsque fut appliquée vigoureusement la tactique « classe contre classe ».
Il n’y a qu’à voir ce qu’ils sont devenus pour affirmer qu’il n’a rien perdu après la fuite de ces renégats.
La force du Parti
Et nous voici maintenant à l’époque où le Parti communiste devra accomplir sa mission et jouer son rôle révolutionnaire.
Quelle est sa force ?
Son rayonnement et son prestige sont grandissants, surtout, il faut le dire, dans la région parisienne du pays.
Le Parti possède l’Humanité qui, malgré les agressions, les scissions, la crise, reste l’un des plus importants journaux politiques de la France. Il tire beaucoup plus d’exemplaires que le Populaire des S.F.I.O. avec leurs 130 députés.
A son appel le Parti voit accourir chaque année au Mur 80.000 prolétaires.
A Garches, cette année, ils étaient 100.000 autour de l‘Humanité.
Dans les usines, dans les casernes, sa popularité est croissante.
Il recueille 800.000 voix aux élections.
Et voici cependant que malgré cette évidente sympathie dont le Parti est entouré dans le prolétariat, l’effectif dont il dispose ne nous satisfait pas.
Nous disons ouvertement nos faiblesses à tous les travailleurs. C’en est une grande lorsque la force de l’organisation ne correspond pas à la grande popularité du Parti. On assiste en foule à ses meetings. Il y règne un grand enthousiasme. Mais on hésite à adhérer.
Il en faut chercher les raisons et surtout porter immédiatement les remèdes les plus urgents à ce mal dangereux.
La discipline demeure la loi du Parti
On a reproché au Parti son prétendu sectarisme. Camarades un grand parti ne se forme que dans l’action, et il arrive souvent que, dès le début, un parti jeune se laisse aller à des erreurs, qu’il soit atteint de maladies infantiles. Le nôtre n’y a pas échappé. Il a présenté des périodes de sectarisme qui l’ont écarté des masses.
Mais la réaction a été complète et on ne saurait dire aujourd’hui que la direction du Parti est coupable de sectarisme. Elle le combat partout où il se manifeste, ainsi que l’opportunisme de droite. Sa règle générale est par tous moyens se rapprocher des masses, non pour les suivre dans leurs illusions, mais pour leur indiquer par la persuasion le chemin véritable de leur salut. Le comité central recommande aux communistes de s’occuper avant tout de toutes les revendications ouvrières, même les plus modestes, et vivre chacune des batailles prolétariennes pour les faire aboutir. Les communistes ne sont-ils pas présents dans toutes les grèves, dans tous les combats de classe des prolétaires ?
Certes, il est bien entendu que la discipline demeure la loi de chacun des membres du Parti. On peut, on doit discuter dans le Parti, du haut en bas. Mais quand la majorité a décidé, il faut que tous s’inclinent, les élus, les journalistes, les responsables plus que les autres. Et s’ils ne s’inclinent pas, ils sont frappés. Le Parti a frappé des élus et on lui a fait les plus vifs reproches. Mais le Parti communiste n’est pas comme le Parti socialiste un appendice de la fraction parlementaire. C’est à celle-ci d’obéir au Parti sous peine d’exclusion.
C’est la volonté ouvrière qui s’affirme ainsi, pour le bien de tous : et nulle rébellion ne saurait s’excuser surtout chez les dirigeants et les chefs.
Est-ce que chacun ne comprend pas combien est indispensable dans les luttes qui vont venir la cohésion, l’action de masse d’une grand parti ?
Lénine s’élevait avec force contre « cet anarchisme de grand seigneur » qui oppose le caprice ou l’intérêt de certains à la direction de l’organisme central agissant au nom de tous.
Dans la masse des événements sociaux, au milieu des immenses problèmes politiques et économiques qui nous pressent, il est difficile de se retrouver.
D’autre part, le combat est sévère et l’ennemi de classe connaît la stratégie et la tactique.
Il faut donc pour lui répliquer, un parti centralisé groupant les meilleurs éléments de la classe ouvrière, un parti expérimenté, sachant se débrouiller au milieu des écueils et connaissant les lois du mouvement révolutionnaire.
Et quand le comité central, après consultation du Parti a parlé, alors soumission volontaire et discipline rigoureuse ! c’est la vertu maîtresse, car l’autonomie de chacun et l’indépendance de fractions et de groupes à notre intérieur, c’est la certitude de la défaite.
Une recrue nouvelle est un bien précieux
On a aussi reproché au Parti un mauvais régime intérieur ; de mauvaises méthode de travail. Ici on a souvent raison, et il faut de prompts remèdes.
On a dit : le Parti demande trop de sacrifices personnels et financiers à ses adhérents. Convenons que l’observation est juste et que le Parti doit en tenir compte.
De plus, on ne doit pas exiger que l’adhérent passe toutes ses soirées en réunions. Deux soirées obligatoires par semaine dans le temps normal. Les autres facultatives. Moins de tâches à des camarades qui en sont accablés.
On oppose à cela qu’il faut des ressources au Parti.
Sans doute, il faut de l’argent dans les caisses de la cellule et dans celle du comité central. Mais ici, que le trésorier remplisse sa fonction, qui est en effet très importante. Un bon secrétaire est l’animateur de la vie de la cellule. Un bon trésorier joue un rôle de premier plan. A lui de trouver de l’argent par des initiatives multiples sans en exiger mécaniquement et exclusivement des adhérents ! Ils se plaignent de ne pouvoir plus y tenir.
En outre, nous nous sommes plaints, les uns et les autres, que le Parti, lorsqu’il a recruté, ne sait pas retenir près de lui les nouveaux camarades. Il y a des chiffres éloquents que chacun connaît. Je les rappelais, l’autre jour ; dans l’Humanité. Pourquoi ce déplorable état de choses ? C’est qu’on ne sait pas bien travailler dans la cellule. On s’y occupe trop de menues discussions, ou trop personnelles. On perd de vue les controverses plus élevées. Chaque mois, chaque cellule devrait organiser au moins une réunion éducative sur le grand fait social du moment (grèves ; incidents internationaux) sur leur analyse, sur les méthodes d’action qui s’imposent, de ce fait, aux travailleurs.
On doit trouver des sujets intéressants qui éveilleront l’attention des camarades. Il ne manquent pas. Je propose que la région suive spécialement pour commencer une ou deux cellules des grandes usines, les fasse vivre d’une vie intense et modèle et les offre en exemples aux autres.
Cela vaudra mieux que d’accabler de tâches écrasantes toujours les mêmes camarades ; ils se rebutent, ils nous quittent. Ils n’ont pas toujours trouvé bon accueil ! Recevons-les au contraire avec une fraternelle cordialité. Ne les tenons pas du premier coup pour des communistes 100%. Distribuons leur avec intelligence le travail qu’ils peuvent réaliser. Utilisons-les au mieux ! On est bien loin de suivre ces sages préceptes en certaines régions du Parti d’où nous recevons de multiples doléances.
Disons-nous qu’une recrue nouvelle pour le Parti, c’est un bien des plus précieux qui entre dans notre collectivité. C’est un compagnon volontaire de notre dure lutte. C’est un camarade qui doit demain devenir à son tour un conducteur de masses lorsqu’il aura été intégré dans l’avant-garde, dans l’état-major de la classe ouvrière qu’est notre parti révolutionnaire.
Allons donc chercher des recrues partout en temps ordinaires et plus encore dans les luttes économiques et sociales. Allons les chercher chez les inorganisés, dans les usines et les puits, chez les anciens combattants, chez les petits fonctionnaires, les travailleurs des Services publics et surtout chez les socialistes honnêtes que nous avons tant le devoir de convaincre. Allons dans tous les rangs des prolétaires qui, de plus en plus cherchent leur voie et que nous devons arracher à l’influence du fascisme qui les guette et du réformisme qui les illusionne, les dupe et les dévoie.
Le communisme vaincra !
On lit partout : il n’y a plus que deux solutions : ou le fascisme ou le communisme !
C’est ainsi que parlent nos pires ennemis : « Je vous ai sauvés du bolchevisme », dit Hitler aux hommes d’État de l’Europe pour les entraîner avec lui dans la croisade contre l’U.R.S.S.
Et Lloyd George lui répond : « C’est vrai, après le fascisme, l’Allemagne passera au bolchevisme. »
De fait, si on regarde ce que se passe outre-Rhin on voit que le socialisme, la démocratie y ont disparu dans le tourmente hitlérienne. Ils n’étaient que des partis adaptés à la démocratie pacifique, sans esprit combatif et hors de la réalité révolutionnaire.
Au contraire, chaque jour le Parti communiste se signale par un nouvel acte héroïque. Son organisation clandestine lui permet de rester en contact dans les usines avec les masses ouvrières et de les alerter par des journaux, par des tracts, par des manifestations multiples et constantes.
Le communisme reste ainsi, là comme ailleurs, l’unique espérance ouvrière parce qu’il fut le seul parti qui, avant la rafale, avait su grouper une forte élite, l’aguerrir, la préparer matériellement et moralement au combats difficiles qui la mèneront à la prise du pouvoir.
Les communistes allemands était plus de 300.000 avant le 5 mars et font héroïquement leur travail révolutionnaire souterrain. Ce sont eux qui finiront par vaincre Hitler.
Ils montrent par leur action ce qu’est un vrai parti communiste.
C’est qu’avant eux un homme s’était levé au début de ce 20e siècle, un révolutionnaire qui est le plus grand de tous les temps et qui avait compris, défini et réalisé ce qu’est, ce que doit être un véritable ouvrier révolutionnaire.
Lénine a passé sa vie à dresser un état-major ouvrier pour la guerre de classes qui ressemble à l’autre. Les social-démocrates et les réformistes le traitent de sectaire, de diviseur de la classe ouvrière et d’utopiste. Ils se refusaient, en particulier, à admettre, avec lui, la réussite d’une discipline rigoureuse et seules des formations clandestines. Ils diluaient et affadissaient la théorie du marxisme et de la lutte des classes par des concessions au régime capitaliste et aux thèses paresseuses du réformisme.
Mais Lénine a tenu bon sans faiblir.
Le parti qu’il a forgé, la forte minorité ouvrière sélectionnée, qu’il a disciplinée et instruite, qui a su rester en contact avec les masses, s’est révélée, un jour historique, comme seule capable de guider le prolétariat d’une grand pays à la conquête du pouvoir, puis à la consolidation de ce pouvoir, puis au triomphe du socialisme.
Lénine avait surtout porté son effort sur les cellules d’usines. C’est sur elles qu’était bâti le Parti bolchevik. Elles devaient vivre illégalement, secrètement pour être à l’abri des renvois et des poursuites des policiers. Cette prudence et cette action secrète s’imposent encore partout, afin de dépister les mouchards. Nos camarades russes avaient su apprendre à travailler prudemment et efficacement dans des conditions délicates.
Camarades, nous vous demandons à tous de venir avec nous pour préparer dans ce pays où le sort nous a placés, la même révolution qui a sauvé nos camarades soviétiques. Vous avez pu hésiter : l’heure est venue où chacun doit vaincre ses hésitations. Chaque ouvrier a le devoir de s’enrôler dans l’armée de sa classe, s’il veut demain résister victorieusement au fascisme et à la guerre qui sont là, à nos portes, car, l’on peut dire que l’incendie, déjà, est tout près d’atteindre nos maisons.
Pour vaincre, les prolétaires français doivent s’inspirer de leur précédent et prendre les habitudes de combat imposées par les circonstances.
Voilà le modèle pour tous les prolétariats du monde. C’est parce que Lénine a créé un bloc ouvrier puissant par son énergie, son intelligence, sa compréhension de la lutte, son courage, son dévouement absolu que la révolution prolétarienne a pu triompher des tsaristes, des démocrates et des chefs socialistes à la Kérensky-Blum.